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Thierry Meyssan est bien connu, sur la toile et ailleurs, pour sa critique des mécanismes de désinformation made in USA. Dans ce texte, il démonte le, ou plutôt les scénarii mis en oeuvre successivement par l'administration américaine - et notamment la commission des Affaires étrangères du sénat américain et son président le républicain  néoconservateur John McCain - pour renverser le régime syrien : rien ne manque, prise de contrôle d'une province tête de pont des insurgés, d'abord vainement à Deraa [...]

Le bras de fer se poursuit donc, mais le régime reste soudé, gardant l’appui des institutions, notamment l’armée, le parti Baas et la classe commerçante et la grande masse des citadins.


La cohésion de la Syrie face à l’offensive turco-occidentale

Par Thierry Meyssan et New Orient News,



Un Syrien embrasse le portrait du chef de l'Etat, symbole de l'unité de la patrie

Thierry Meyssan est bien connu, sur la toile et ailleurs, pour sa critique des mécanismes de désinformation made in USA. Dans ce texte, il démonte le, ou plutôt les scénarii mis en oeuvre successivement par l’administration américaine – et notamment la commission des Affaires étrangères du sénat américain et son président le républicain  néoconservateur John McCain – pour renverser le régime syrien : rien ne manque, prise de contrôle d’une province tête de pont des insurgés, d’abord vainement à Deraa puis sur la frontière libanaise sans plus de succès ; puis entrée en ligne de la Turquie sous des prétextes humanitaires. Autant de procédés alliant subversion et désinformation déjà mis en oeuvre peu ou prou par Washington contre l’Irak. Mais, jusqu’à présent, rappelle Meyssan, le régime baasiste a déjoué ces plans, et tient bon.

 

Malgré les immenses moyens de subversion financiers et médiatiques et de renseignement, mis en place par les États-Unis, leurs alliés européens, arabes et turcs, la situation en Syrie est repassée sous le contrôle du gouvernement, avec la reprise en main par l’armée de la région de Jisr al-Choughour, contrôlée quelques jours par des extrémistes armés (Voir ci-dessous) et la poursuite des réformes politiques et administratives profondes dont les résultats concrets commencent à se faire sentir.

Un plan américain de déstabilisation mis en oeuvre à Deraa

Le plan fomenté contre la Syrie était pourtant élaboré avec beaucoup de minutie. Un document britannique confidentiel, dévoilé par un Centre de recherches, révèle que le président de la commission des Affaires étrangères au Sénat US, John McCain, aurait demandé à ses conseillers de rencontrer des opposants syriens dans plusieurs capitales, notamment à Londres, Paris et Istanbul, ainsi qu’aux États-Unis, pour les encourager à s’organiser et à élaborer un plan qui va crescendo pour déstabiliser et décrédibiliser le régime et le pousser à la faute.
Le point fort de ce plan consistait à s’emparer d’une région puis à constituer un petit fief sur le territoire syrien pour en faire le bastion des insurgés et une tête de pont pour l’intervention de l’Occident. Il prévoit aussi de trouver une figure, jeune de préférence, pour dénoncer les horreurs du régime, Les opposants feraient de cette région « libérée » leur capitale, un peu comme l’est Benghazi pour les rebelles libyens.
Ce plan a d’abord été mis en œuvre à Deraa, une ville choisie en raison de sa proximité avec la Jordanie. Il y a eu ensuite l’affaire montée en épingle du jeune Hamza Khatib, un adolescent qui avait participé à une manifestation et qui a été retrouvé mort. Les médias dirigés se sont saisis de l’affaire, assurant que le garçon avait été torturé, alors que le médecin légiste et le père de la victime le démentaient fermement.

La Turquie, auxiliaire intéressée des Américains…
Devant l’échec du plan à Deraa, le choix s’est porté sur une autre zone, frontalière du Liban celle-fois. À Tall Kalakh, des groupes armés ont pris le contrôle de la ville et poussé les habitants à l’exode vers le Liban, pour créer un « drame humanitaire » justifiant une intervention occidentale. C’est sous ce prétexte humanitaire que l’Otan et l’Occident étaient intervenus dans le Nord de l’Irak, au début des années 90, et en ex-Yougoslavie, à la fin de la même décennie. Nouvel échec, en raison de la riposte vigoureuse mais ciblée de l’armée syrienne, qui fait preuve d’une cohésion remarquable face aux menaces de démembrement de la Syrie et de guerre civile programmée.
Après l’échec de cette nouvelle tentative, les États-Unis et leurs alliés ont utilisé les grands moyens, faisant entrer en scène la Turquie. Celle-ci a d’abord accueilli sur son sol, à Antalya, non loin de la frontière avec la Syrie, une réunion d’opposants syriens hétéroclites. Juste après la fin de cette réunion, une escalade sans précédent a eu lieu sur le terrain, couronnée par la prise de Jisr al-Choughour, non loin de la frontière turque. Mais dans cet épisode, les groupes extrémistes ont montré leur vrai visage, massacrant 120 membres des forces de sécurité syriennes, dont certains ont été décapités.
Les autorités turques ont immédiatement monté un camp pour accueillir les réfugiés, facilitant l’arrivée de journalistes du monde entier pour diffuser les images du « drame humanitaire ». Dans le même temps, la France et la Grande-Bretagne se débattaient au Conseil de sécurité pour faire voter une résolution condamnant le régime syrien. Faut-il des preuves supplémentaires pour montrer à quel point les parties de ce plan sont synchronisées entre des acteurs régionaux et internationaux pour atteindre l’objectif fixé qui est d’affaiblir la Syrie, voire de la démembrer, si possible ?
Les responsables turcs affirment, pour justifier leurs ingérences, que les problèmes de la Syrie concernent la Turquie, les tissus sociaux des deux pays étant extrêmement étroits, notamment par le biais des communautés kurdes et alaouites. Mais leurs arguments humanitaires ne masquent pas leurs visées sur le territoire syrien.

Le régime tient sur tous les fronts

Face à ce troisième épisode, le régime syrien a réagi avec un mélange de fermeté et d’ouverture, accélérant le processus de réformes et décidant de reprendre le contrôle de Jisr al-Choughour. Il a aussi envoyé des messages indirects à Ankara, affirmant qu’il ne tolèrerait aucune atteinte à la souveraineté nationale.
Le bras de fer se poursuit donc, mais le régime reste soudé, gardant l’appui des institutions, notamment l’armée, le parti Baas et la classe commerçante et la grande masse des citadins.
Les stratèges de Langley ont manqué d’imagination. Ils pensaient qu’ils pourraient reproduire facilement le modèle libyen en Syrie. Mais c’était mal connaitre l’attachement des Syriens à l’unité et la souveraineté de leur pays et ignorer à quel point le sentiment national est ancré dans leur mémoire collective. Sinon, comment expliquer le fait que trois mois après le début des troubles, et en dépit des moyens énormes déployés, pas un seul officier, diplomates, hommes politiques ou responsable du Baas, n’ait fait défection. Face à cette cohésion, les médias dirigés ont été contraints d’inventer des histoires de dissidences, comme celle de l’ambassadrice de Syrie à Paris, Lamia Chakkour, ou du pseudo-lieutenant Abdel Razzak Tlass. De tristes histoires à dormir debout qui ne font l’honneur ni à France 24 ni à Al-Jazeera.
La Syrie est un pays qui joue un rôle-clé dans des dossiers cruciaux de la région, en Irak, en Palestine, au Liban, en Jordanie et même en Turquie. Il ne sera pas facile de la faire tomber, même pour les plus brillants stratèges israélo-US.



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