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Alors qu'expire aujourd'hui le délai - contesté par le gouvernement syrien - sur le retrait des forces de Damas des centres urbains, la violence a crû en intensité ces dernières 48 heures. Le gouvernement syrien, on le sait, a exigé du CNS et de l'ASL mais aussi des trois Etats musulmans qui les soutiennent ouvertement, un engagement écrit sur le retrait des groupes armés et l'arrêt de toute opération de leur part. L'ASL a par la voix de son chef [...]



Le jour le plus long…

Par Louis Denghien,



Un point de contrôle de l'armée dans la banlieue de Damas : le gouvernement syrien a préféré prendre le risque d'un regain de tension internationale plutôt que celui d'une nouvelle "bab-amrisation" des villes de Syrie

Un point de contrôle de l'armée dans la banlieue de Damas : le gouvernement syrien a préféré prendre le risque d'un regain de tension internationale plutôt que celui d'une nouvelle "bab-amrisation" des villes de Syrie

Alors qu’expire aujourd’hui le délai – contesté par le gouvernement syrien – sur le retrait des forces de Damas des centres urbains, la violence a crû en intensité ces dernières 48 heures. Le gouvernement syrien, on le sait, a exigé du CNS et de l’ASL mais aussi des trois Etats musulmans qui les soutiennent ouvertement, un engagement écrit sur le retrait des groupes armés et l’arrêt de toute opération de leur part. L’ASL a par la voix de son chef nominal refusé de donner de telles garanties, estimant que sa « parole » suffisait.

En conséquence de quoi, le gouvernement syrien a opté pour une offensive généralisée contre les bandes armées, pour diminuer leur potentiel au maximum dans les jours qui viennent.

Une stratégie risquée, mais inévitable

Cette stratégie a conduit à une intensification des combats dans le nord du pays, entre Idled, Alep et la frontière turque, mais aussi dans certains quartiers de Hama, dans certains secteurs des environs de Damas, l’OSDH affirmant que 101 personnes sont tombées victimes des violences, dont une majorité de civils, pour la journée de lundi.

Cette stratégie syrienne est évidemment risquée. D’abord sur le plan international : lundi Ban Ki-moon a sommé Damas de « mettre immédiatement un terme à ses actions militaires visant des civils et de respecter les engagements pris auprès de l’émissaire spécial » Kofi Annan. De son côté, le gouvernement chinois a lui aussi pressé Damas d’appliquer les dispositions du plan Annan. C’est aussi l’attitude du chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov qui recevait lundi une délégation syrienne emmenée par Walid al-Mouallem : M. Lavrov a en effet pressé son homologue d’agir « de manière plus décisive » pour appliquer le plan de paix. Mais le chef de la diplomatie russe a, dans le même temps, invité « les pays qui ont de l’influence » sur les groupes d’opposition à les « encourager » à appliquer immédiatement le cessez-le-feu. Walid al-Mouallem, de son côté, a affirmé à Lavrov que son gouvernement avait commencé à mettre en oeuvre les recommandations du plan Annan, notamment en ce qui concerne le retrait des forces militaires, du moins « dans certaines provinces ». Quant au cessez-le-feu, il interviendra, selon al-Mouallem, après l’arrivée des 250 observateurs de l’ONU.

Par ailleurs la proximité des combats avec les frontières a conduit à des incidents diplomatiques : un cameraman de la chaîne libanaise al-Jadeed a été tué sur la frontière et le chef du gouvernement libanais a exigé des autorités syriennes qu’elles fassent la lumière sur les circonstances – pour l’heure imprécises – de cette mort. Surtout, le fait que deux réfugiés syriens – et un interprète turc – ont été blessés du côté turc de la frontière par des tirs venant de Syrie – d’autres sources parlent de 4 Syriens et de 2 Turcs blessés – sert de nouveau prétexte à Erdogan pour jeter de l’huile sur le feu : le Premier ministre turc a déclaré ce mardi 10 avril que cet incident constituait une « claire violation » de l’intégrité territoriale turque et que son pays userait « de tous ses droits découlant du droit international« . Il s’agit certainement d’une nouvelle rodomontade, mais elle contribue à « acclimater » son opinion à l’idée d’une intervention militaire, même limitée, contre la Syrie. L’afflux de milliers de réfugiés syriens en Turquie – ils seraient, affirme une source gouvernementale, 25 000 – contribue aussi à « énerver » les Turcs, qui toutefois touchent là la monnaie de leur soutien actif à l’ASL.

Sur le fond de l’affaire, on dira que le gouvernement Erdogan, qui abrite et et même entraîne depuis des mois les groupes de l’ASL, qui a fréquemment franchi la frontière irakienne, sur terre et dans les airs, pour frapper les rebelles kurdes, ce gouvernement est assez mal placé pour dénoncer des « violations » largement fantasmatiques de sa frontière. Mais l’honnêteté intellectuelle n’a rien à voir avec les relations internationales, et encore moins avec Erdogan.

Un des principaux protagonistes de cette crise, Kofi Annan, doit visiter deux camps de réfugiés dans le sud de la Turquie, alors que le vice-ministre turc des Affaires étrangères a estimé que le plan Annan ne serait pas appliqué. L’émissaire de l’ONU et de la Ligue arabe va avoir besoin de tout son sang froid. Dans l’immédiat il a fait savoir qu’il allait adresser une lettre au Conseil de sécurité, ce qui promet de nouveaux « remous » onusiens.

Bref, la tension est plus vive que jamais autour de la Syrie, attisée comme de juste par les médias internationaux, enfin occidentaux, qui mettent une nouvelle fois le gouvernement de Bachar al-Assad en accusation. Mais celui-ci a pesé le pour et le contre, et est vite arrivé à la conclusion qu’il était totalement exclu de retirer ses forces pour laisser s’infiltrer à nouveau des groupes armés dont l’allégeance politique est imprécise, et dont d’ailleurs les chefs politiques et militaires théoriques n’ont souscrit aucun engagement autre qu’oral.

 

Pour autant, on peut raisonnablement envisager que :

-Kofi Annan ne renoncera pas facilement à son plan, alors qu’il a envoyé un général préparer l’arrivée d’observateurs onusiens. Il doit essayer d’obtenir un accord de cessez-le-feu plus « formel » de la part du CNS et de l’ASL, seule garantie qui pourrait diminuer la méfiance justifiée de Bachar al-Assad.

-Erdogan, en dépit de son maximalisme verbal, ne va pas se mettre une guerre sur les bras avec la Syrien, dont il ne pourrait jamais contrôler les conséquences, notamment sur le plan intérieur.

-La Russie et la Chine, surtout la Russie, quel que soit le niveau de leur agacement devant le caractère répétitif et inextricable de la crise syrienne, n’ont pas envie de déstabiliser le pouvoir en place par une condamnation. Parce que, tout simplement, c’est Bachar ou le chaos et l’islamisme, en Syrie mais aussi au niveau régional.

-Enfin, on peut penser que l’ASL et les bandes armées en général reçoivent de durs coups qui diminuent leur capacité de nuisance. Et annihiler ou au moins entamer fortement le potentiel de l’ASL est une priorité nationale en Syrie, dont découlent beaucoup d’autres choses.

On verra vite si nous nous trompons.

 

 

 



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26 commentaires à “Le jour le plus long…”

  1. Mohamed Ouadi dit :

    M. Lavrov a tenu à assurer de l’inexistence d’aucune menace ou délais dans le communiqué du Conseil de sécurité, « Les Etats-Unis, et les autres, doivent exercer des pressions sur l’opposition syrienne pour mettre en œuvre le plan d’Annan et cesser le feu sous supervision de l’ONU ».

  2. Blacky dit :

    les monstres impérialistes et sa sempiternel rhétorique , on ne comprend pas la Russie.

  3. Sandra dit :

    Ce mec ne cesse de m’apprendre …..Quel ignare!!
    Algérie, un os dans la gorge de BHL ?

    Ce faux chef de la diplomatie française durant la crise libyenne vient de déclarer lors du colloque tenu à Marseille intitulé « La guerre d’Algérie…cinquante après » : « L’Algérie n’est pas un pays arabe ni islamique mais un pays juif et français, sur un plan culturel » et il ajouta « que l’Algérie connaîtra elle aussi un printemps arabe ».

    ——–
    Tous les Algériens que je connaisse sont musulmans et ils font le Ramdan…de quoi il parle???
    Le restant de l’article est intéressant quand même cliquez sur le lien
    http://www.silviacattori.net/article3069.html

  4. betehem dit :

    Quelques questions et remarques :

    Selon certaines sources, l’accord écrit demandé à l’ASL ne faisait pas partie du plan Annan, mais a été subitement ajouté. Même Silvia Cattori n’en parle pas, mais j’ai peut-être mal lu ?
    (Il me semble que si c’était le cas, le réprésentant de l’ASL n’aurait pas eu à refuser clairement de donner cet accord écrit).

    D’autre part, dans vos infos, il semble que ni la Russie ni la Chine ne soulèvent ce « détail » qui me semble très important, de l’accord écrit de l’opposition de son égal cessez-le-feu. Pourquoi ? Evidemment que le gouvernement ne va pas laisser les terroristes reprendre leur souffle paisiblement.

    Et troisièmement, Ces 250 observateurs de l Onu, ils comptent venir quand ? Pourquoi ne sont-ils pas déjà là ? On est bien le 10, il me semble.

    Merci de vos infos.

    • betehem dit :

      J’ai tenté à nouveau un petit commentaire au Figaro. Ca m’étonnerait qu’il passe. Avec les propos « essentiels » de BHL.
      Mais ouf, mon ordi n’a pas explosé.

    • Mohamed Ouadi dit :

      Pour être précis, ce n’est pas à l’opposition armée CNS/ASL que la Syrie a demandé des garanties, mais à Kofi Annan lui-même en tant qu’émissaire spécial de l’ONU. Et de la ligue arabe ?! la Syrie ne lui reconnaît pas cette dernière représentativité, depuis que la ligue a manqué à ses engagements envers la Syrie.
      Pour les observateurs il y’a un un protocole à préparer par l’équipe technique d’Annan et les responsables syriens, basé sur le respect de la souveraineté de l’Etat syrien, et qui sera à mon avis signé entre les deux parties, comme cela a été le cas avec la ligue arabe pour son protocole, bafoué et enterré par les pays du golf à la première occasion. Et ce protocole, ne doit pas être une occasion de reproduire la baba-amrisation de villes et zones syriennes !

  5. betehem dit :

    Merci Silvia, j’ai lu les déclarations grandioses de BHL.
    Si une Justice existait dans un tribunal international non manipulé, je le verrais très bien y être traîné en plus de quelques autres, pour insultes raciales, appels à la haine raciale, et appels à la guerre et au meurtre.

  6. betehem dit :

    Aucun rapport avec les commentaires précédents :
    Mais j’ai vu qu’une délégation de suédois s’était rendue en Syrie pour saluer des soldats blessés et leur confirmer leur soutien.
    Ca veut dire que les lignes aériennes sont rétablies, peut-être les téléphones aussi ? …
    C’est sympathique de leur part.
    Leur présence a-t-elle une valeur de témoignage ?

    • sowhat dit :

      « Ca veut dire que les lignes aériennes sont rétablies, peut-être les téléphones aussi ?  »

      que voulez-vous dire ? pouvez donner plus d’informations sur les interruptions ayant affecté les lignes aériennes ou les communications téléphoniques

      à ma connaissance, sauf cas de force majeur les communications ont été maintenues depuis le début des troubles de même que l’accès à Internet, Facebook etc… (trop beau pour un soi-disant dictature mais c’est pourtant vrai … ce n’est donc peut-être pas une vraie dictature alors tiens tiens ?)

      quand aux lignes aériennes, toutes fonctionnent à l’exception de celles qui sont impliquées par les sanctions ou les suspensions du fait de pays tiers.

  7. Djezehel dit :

    La boucle est bouclée : BHL se prend pour Isaac Adolphe Crémieux qui travaillait pour Rothschild qui, pendant que son mentor achetait par millions des hectares en Palestine,profitait de la guerre de 1870 pour faire passer dans le dos des français et surtout celui de Napoléon III qui voulait donner les mêmes droits à tous les sujets de l’Empire, son décret inique, qui contenait en son germe la guerre d’Algérie. ON ne traite pas les habitants légitimes d’un territoire, kabyle ou arabe de sous-hommes impunément.

  8. Maroquino dit :

    En tout cas une zone d’exclusion aérienne ne pourra pas se faire étant donner le système anti-aérien dernier cris que possède la Syrie, en effet un général américain je ne sais plus son nom affirme que s’aventurer sur l’espace aérien syrien serait « mortel »(ce sont ces mots). Alors si il faut continuer à attaquer quitte à ne pas respecter ce cessez le feu, alors il le faut. Il est certain que ça ne se passera pas comme en Libye, ce qu’il faut c’est une offensive massive et sans interruption pour en finir une bonne fois pour toute! Et ensuite négocier bien sûr.

  9. hezbollah dit :

    Et bientôt le dernier des derniers des systèmes anti-aérien S-500

    http://youtu.be/anpTiQMpOcY

    • Maroquino dit :

      La Russie refusait les S-500 aux iraniens, sait tu si finalement ont leurs en a livrés? merci d’avance.

      • hezbollah dit :

        @ Maroquino

        Les Russes ont vendu les S 300 a l’ Iran, peut être même les S 400.

        Les Russes n’ ont pas encore vendu les S 500, ça reste leur exclusivité pour le moment.

        • Anonyme dit :

          La Russie avait annoncé un embargo sur la vente du S-300 à l’Iran. La situation reste floue quant à l’acquisition d’un tel système par ce pays.
          Le système S-500 est actuellement encore en développement. Les premiers essais sont pour 2015/2017. Alors, l’export, c’est pas pour demain et j’espère que la situation actuelle sera réglée d’ici là!

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