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Prenant prétexte des attaques perpétrées contre leurs ambassades respectives à Damas, le lundi 11 juillet, Washington et Paris semblent redoubler d'agressivité vis-à-vis de Damas. Côté américain, Barack Obama himself est monté au créneau mardi 12 juillet en mettant solennellement en garde le gouvernement syrien lors d'un entretien accordé à la chaîne CBS. Il a ainsi assuré que "toutes les mesures nécessaires" seraient prises pour protéger l'ambassade de Damas. Pour le président américain, son homologue syrien "perd sa légitimité aux yeux [...]



Washington et Paris rivalisent d’indignation télégénique

Par Guy Delorme,



Barack Obama, successeur de Georges Washington Bush Jr à la Maison Blanche

Sur notre photo : le successeur - à plus d'un titre - de Bush Jr à la Maison Blanche

Prenant prétexte des attaques perpétrées contre leurs ambassades respectives à Damas, le lundi 11 juillet, Washington et Paris semblent redoubler d’agressivité vis-à-vis de Damas. Côté américain, Barack Obama himself est monté au créneau mardi 12 juillet en mettant solennellement en garde le gouvernement syrien lors d’un entretien accordé à la chaîne CBS. Il a ainsi assuré que « toutes les mesures nécessaires » seraient prises pour protéger l’ambassade de Damas. Pour le président américain, son homologue syrien « perd sa légitimité aux yeux de son peuple« .

On pourrait très vite rétorquer que Barack Obama a lui aussi perdu pas mal de sa légitimité aux yeux du peuple américain – pour ne pas parler de celle de son partenaire particulier Nicolas Sarkozy vis-à-vis des Français. Mais il importe de revenir très vite, dans cette affaire, au fond. Qui est que les Etats-Unis n’ont pas renoncé, en  dépit du gigantesque gâchis irakien, de la chute de leur obligé Moubarak et des ennuis de leur ami yéménite, à remodeler selon leurs vues et intérêts – qui sont aussi ceux des Israéliens – le Proche-Orient : à Washington les présidents – Bush et Obama – passent, les néo-conservateurs pro-sionistes demeurent aux commandes… C’est donc dans ce contexte idéologique que l’administration Obama cherche à créer en Syrie un  nouvel Irak, en s’appuyant sur les mécontentements sociaux ou communautaires, et en jouant cyniquement la carte des radicaux islamistes d’Hama et d’ailleurs.

La secrétaire d’Etat Hillary Clinton a de son côté estimé que Bachar al-Assad était « loin d’être indispensable« . Aux autorités américaines, c’est certain : car Washington reproche essentiellement à la Syrie de Bachar d’être depuis toujours et de demeurer un maillon essentiel de l’axe – non pas du « Mal » – mais de la fermeté arabo-musulmane face aux agissements israélo-américains, avec les résistances libanaise et palestinienne et l’Iran. Et, de fait, Bachar el-Assad est moins « indispensable » à Mme Clinton, de ce point de vue, que, disons Hamid Karzaï ou l’émir du Qatar, ces leaders charismatiques et légitimes bien connus.

Il ne manquait à ce concert de l’unilatéralisme anglo-saxon que la voix de l’ex-premier ministre britannique Tony Blair. Celui qui a engagé son pays en Irak et en Afghanistan, se voyant de ce fait décerner par ses compatriotes le sobriquet de « caniche de Bush« , a estimé lundi 11 juillet qu’il était « trop tard » pour Bachar al-Assad. Il serait intéressant de comparer les taux de popularité de Blair et de Bachar dans leurs pays respectifs, mais retenons cet aveu – ce regret – du plus impopulaire des Prime ministers de Sa Majesté : une action militaire contre la Syrie n’a « pas de soutien » international. So sorry, Tony !

L’exquise et hémiplégique sensibilité de François Fillon

Le président syrien Bachar al-Assad et le Premier ministre français François Fillon à Damas le 19 février 2010

Fillon contenant difficilement son indignation à Damas le 19 février 2010

Ce même 12 juillet, François Fillon, Premier ministre transparent et gaulliste virtuel, déplorait sur Europe 1 que la résolution sarko-européene condamnant la Syrie devant le Conseil de sécurité de l’ONU soit bloquée depuis des jours par la Russie et la Chine : « Ca n’est plus acceptable. Le silence du Conseil de sécurité sur la Syrie devient insupportable » a-t-il expliqué.

Décidément, M. Fillon est un garçon sensible. Plus sensible, disons, à ce qui se passe en Syrie – ou plus exactement à ce que l’on dit en France qu’il se passerait en Syrie – depuis 4 mois qu’à ce qui se passe en Israël depuis 40 ans. Ou encore à ce qui se passait en Egypte ou en Tunisie depuis 25/30 ans. Pour ne pas parler des exemplaires démocraties pluralistes que sont à l’évidence l’Arabie Saoudite, le Qatar et le Bahrein – où le peuple s’est soulevé et a été réprimé par l’armée de Ryad, sans que Fillon exprime une quelconque émotion audiovisuelle. En termes au moins quantitatifs, ce sont ces silences là qui sont « insupportables ».

Le Premier ministre de Nicolas Sarkozy, histoire de donner du grain à moudre au moulin de son indignation officielle, a stigmatisé les « agressions extrêmement violentes » commises par des manifestants damascènes contre les ambassades française et américaine. Et, c’est vrai, ces agressions doivent être condamnées. Comme doit être condamnée l’impudence diplomatique de l’ambassadeur Ford venant prendre un petit bain de foule à Hama, au beau milieu d’opposants qui vouent tout de même à la mort le président du pays où il est accrédité. On sait, bien sûr, que le cynisme et l’impudence sont depuis des dizaines d’années les « deux mamelles » de la politique étrangère américaine.

Comme doit être condamnée aussi, dans une moindre mesure il est vrai, la démarche, de même nature sinon de même degré, de notre ambassadeur qui s’est lui aussi exhibé à Hama. Peut-être sur injonction supérieure, peut-être contre sa volonté.

Si l’on doit déplorer, à défaut de s’en étonner, cette hypocrisie occidentale, il faut – quand même – la resituer à son vrai niveau : celui de la gesticulation et de la jactance. Car, mises à part de possibles sanctions économiques et financières, ni Washington, ni a fortiori la France n’ont les moyens d’inquiéter sérieusement la Syrie, Etat quoiqu’on en dise ou écrive solide et moderne, et où la très grande majorité de la population sait ce qui s’est passé et continue de se passer quotidiennement chez le voisin irakien, grâce aux « démocrates » de la maison Blanche et du Pentagone. Etat-clé d’une région stratégique qui continue de bénéficier de l’appui indéfectible de Moscou et de Téhéran, la Syrie est un trop gros morceau à avaler, même pour les appétits robustes des néo-conservateurs d’Amérique et d’Europe. Dans cette affaire au fond, MM. Obama et Fillon ne font que sauver de misérables apparences.

En un mot comme en cent, ce ne sont certainement pas ceux qui sont incapables, en dépit d’une débauche de moyens et d’appuis locaux, de faire plier Kadhafi, qui vont venir à bout de Bachar al-Assad !



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4 commentaires à “Washington et Paris rivalisent d’indignation télégénique”

  1. lafleuriel Zakri dit :

    La France ex-mandataire victime de la Syrie : un comble !
    :
    la France est le dernier pays dans la région qui peut se plaindre de quoi que ce soit des Syriens quand, depuis toujours, depuis des centaines d’années, et de façon récurrente, elle est au coeur des agressions de l’Occident dans la région. Et sans remonter aux sanglantes croisades qui n’étaient qu’une première tentative de colonisation, Les Syriens n’ont cessé d’être au coeur des intérêts cyniques et appétits voraces des puissances ex-mandataires, relayées aujourd’hui par les USA ;
    Nos diplomates en poste à Damas devraient faire un retour assez court en arrière dans l’histoire des relations communes Syro françaises pour se rendre compte qu’honnêtement, ils feraient mieux de se taire, d’adopter un profil bas ainsi que notre ministre des affaires étrangères ! Il y a encore en France et au M.Orient, des tonnes d’archives sur ce que fut notre action désastreuse dans la région et le cynisme maladroit en plus le plus souvent des politiques d’alors…
    Car enfin, notre politique mandataire fut si arrogante et rude qu’il fallut l’interposition de sa rivale britannique pour limiter les dégâts sur la population syrienne et par exemple à Damas comme l’écrit un bon connaisseur de la Syrie G. Degeorge dans son « Damas des Ottomans à nos jours » l’Harmattan et je cite ;
    « A Damas, des coups de feu ayant été tiré des fenêtres du Parlement contre la résidence du général Oliva-Roget,délégué en Syrie, (peu avant 1946 ), les Français ripostèrent à coup de canon, et occupèrent l’édifice. La citadelle ..fut bombardée par l’aviation; Enfin, durant deux jours, les 29 et 3O mai, tentant de rétablir l’ordre, Oliva-Roget fit bombarder la ville, faisant plusieurs centaines de victimes ; les tirs ne cessèrent que le troisième jour, sur injonction des Britanniques et la mise en mouvement de leur 9e armée..
    et l’auteur ajoute Après d’ultimes louvoiements le 7avril 1947, les dernières troupes françaises quittaient la Syrie…Ayant failli à sa mission qui théoriquement consisté à favoriser l’accession à l’indépendance, la France laissait derrière elle, un pays meurtri , mal préparé à une vie politique stable… »
    Cela peu paraître un comble que cette autre puissance mandataire obligée d’arrêter le massacre commis par la France mais cela se répéta voir Suez et l’intervention outrée des autres puissances d’alors.!
    le martyre de Damas sous Mandat français a plusieurs épisodes dont celui de l’incendie de Damas d’ailleurs raconté par le témoignage d’Alice Poullaud mais encore dans un roman de J. Kessel. »le coup de grace
     » Les exactions des Français y sont étalés comme faits d’armes sanglants l « Dans les premières pages le récit nous met dans l’ambiance.
    « Sans doute les toits crevés par l’incendie isolaient le poste, mais à cent pas de lui, en venant du centre de Damas on le pouvait croire encore soudé aux bâtisses qui l’entouraient. Le petit poste surveillait une vaste forteresse que garnissait la partie la plus redoutable au combat comme à la ruse, des habitants de la cité .
    ET le héros guerrier français :un baroudeur, Hippolyte, n’a rien d’un esthète ni d’un romantique qui , du haut de son poste, contemple Damas. Si il reconnait qu’  » A travers le monde, on ne pouvait trouver spectacle plus beau » – la ville longuement décrite par Kessel est  » immense blanche raffinée dans ses courbes presque féminines » – quelques lignes plus loin l’auteur dit de son héros : Il était peu sensible aux formes des cités. S’il contemplait avec tant d’ardeur la molle Damas , c’est qu’il pensait:
    – « Je reconnais bien le palais Azem qu’on a brûlé l’autre mois..voilà les souks bonbardés;Voila le grand quartier près de la rivière;;Et quand il promenait son regard jusqu’au verger sublime, il le considerait comme le plus touffu des traquenards.
    -Elle est belle, chef, la Ghouta?
    C’était Roustchouk qui parlait. Il tenait deux baÏonnettes sur lesquelles étaient enfilées des brochettes de mouton grillée…

    Alors M Juppé et Messieurs les diplomates pour l’intelligence de la région : encore un gros effort de lecture pour l’étéet il conviendrait de montrer moins d’arrogance avant de faire la morale à une population que vous avez l’habitude de bien mépriser…

  2. Albeck dit :

    François Fillon : « Ca n’est plus acceptable. Le silence du Conseil de sécurité sur la Syrie devient insupportable »

    Quel verve, quel engagement qui force l’admiration…! Comme disait mon grand-père, je ne l’aurais pas engagé même comme balayeur…!!!

    Ce qui se passe en Syrie n’est plus acceptable? Pourquoi tant d’engagement et de rage alors que tant de veto américains contre les résolutions des Nations Unies condamnant Israël depuis plus de 60 ans ont permis de laisser tuer des milliers d’hommes de femmes et d’enfants Palestiniens!

    Où étiez-vous, monsieur Fillon, lorsque Tsahal a rasé le Liban et tué des milliers d’enfants?! En laisse je suppose…

    Dans l’article publié par « L’Organisation sioniste mondiale » sur « les plans stratégiques d’Israël pour les années 80 » il est dit : (1)

    « En tant que corps centralisé, l’Égypte est déjà un cadavre, surtout si l’on tient compte de l’affrontement de plus en plus dur entre musulmans et chrétiens. Sa division en provinces géographiques distinctes doit être notre objectif politique pour les années 1990, sur le front occidental.
    Une fois l’Égypte ainsi disloquée et privée de pouvoir central, des pays comme la Libye, le Soudan, et d’autres plus éloignés, connaîtront la même dissolution. La formation d’un État copte en Haute-Égypte, et celle de petites entités régionales de faible importance, est la clef d’un développement historique actuellement retardé par l’accord de paix, mais inéluctable à long terme.
    En dépit des apparences, le front Ouest présente moins de problèmes que celui de l’Est. La partition du Liban en cinq provinces… préfigure ce qui se passera dans l’ensemble du monde arabe. L’éclatement de la Syrie et de l’Irak en régions déterminées sur la base de critères ethniques ou religieux doit être, à long terme, un but prioritaire pour Israël, la première étape étant la destruction de la puissance militaire de ces États._Les structures ethniques de la Syrie l’exposent à un démantèlement qui pourrait aboutir à la création d’un État chi’ite le long de la côte, d’un État sunnite dans la région d’Alep, d’un autre à Damas, et d’une entité druze qui pourrait souhaiter constituer son propre État – peut-être sur notre Golan – en tout cas avec l’Houran et le nord de la Jordanie… Un tel État serait, à long terme, une garantie de paix et de sécurité pour la région. C’est un objectif qui est déjà à notre portée.
    Riche en pétrole, et en proie à des luttes intestines, l’Irak est dans la ligne de mire israélienne. Sa dissolution serait, pour nous, plus importante que celle de la Syrie, car c’est lui qui représente, à court terme, la plus sérieuse menace pour Israël. »

    1) « Kivounim » (« Orientations ») Jérusalem, ndeg. 14, ndeg. de février

    Cette « feuille de route » israélienne a pris un peu de retard mais semble toujours d’actualité!

    Après l’Irak, l’Egypte et la Libye, les manigances touchent désormais la Syrie, le tout dans l’intérêt de cette belle démocratie israélienne, joyau des Nations, lumière illuminant les ténèbres barbares… quelle nausée…

    La Syrie doit être soumise, le Liban, la Jordanie, les territoires palestiniens… Plus le chaos régnera, moins de possibilités de discussions de paix il y aura et plus Israël aura de marge de manoeuvre pour grignoter plus de terres encore…

    Le mythe consistant à faire croire que de pays « démocratiques » stables autour d’Israël est dans l’intérêt d’Israël est tout sauf une vérité! Israël ne veut pas la Paix avec ses voisins, l’histoire l’a démontré…
    Ce qui devient flagrant aujourd’hui, ce sont les liens et les manoeuvres occidentales mises en place dans l’intérêt du dernier état qui pratique encore l’apartheid au 21ème siècle. Le Grand Israël doit voir le jour…

    Le problème est que la déstabilisation de la Syrie ne sera pas aisée, n’en déplaise aux cons-pirateurs, et ce malgré d’autres manoeuvres propres au monde arabe cette fois… mais ceci est une autre histoire.

    AB

  3. fehed dit :

    bonjour ,je suis citoyen francais et vive la syrie et vive bashar,bonne soiree

  4. Ali dit :

    bonjour je suis citoyen français, alaouite de lattaquié d’origine. Je dis également vive la Syrie, mais à bas bachar.
    Sa bêtise nous embarassera

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