A peine le cessez-le-feu proclamé, et appliqué, par le gouvernement, que déjà Burhan Ghalioun et le CNS préparent une épreuve de force pour vendredi, jour traditionnel des mobilisations – post-prière – de l’opposition radicale. Le plus élémentaire sens de la responsabilité voudrait, en de telles circonstances, que l’opposition s’abstienne de toute provocation susceptible de (re)mettre le feu aux poudres. Et, à l’évidence, des manifestations de rue emmenées par les plus radicaux des opposants à Bachar al-Assad sont propices à un maximum de provocations. Que des militaires, face à une foule surexcité par de leaders islamistes, perdent leur sang froid et tirent, fut-ce en l’air, et tout le processus de paix sera compromis, et le gouvernement mis en accusation par les habituels procureurs diplomatiques et médiatiques.
Le CNS veut-il vraiment du plan Annan ?
C’est peut-être justement ce que cherchent les stratèges du CNS que les obligations contenues dans le plan Annan – cessez-le-feu, mais aussi désarmement durable, négociations avec le pouvoir – doivent quelque peu contrarier dans leur jusqu’au-boutisme anti-Bachar.
De fait, l’annonce, en début d’après-midi, de la mort, dans la province de Hama, d’un « civil« , tué par des tirs attribués aussitôt par l’OSDH à des chabihas ou des soldats du régime, interprétation abondamment relayée par les médias français, participe aussi de cette stratégie de la tension que les adversaires syriens ou étrangers du pouvoir veulent continuer à entretenir, pour pousser, aussi vite que possible, le régime à la faute.
Bref, le gouvernement n’a rien à attendre des CNS et autres ASL, et le plan de paix de Kofi Annan ne tient vraiment qu’à un fil, qui pourrait être rompu à l’occasion des manifestations de vendredi. Et ce alors que les Euro-américains sont plus que jamais en embuscade diplomatique : ainsi l’OTAN vient de se servir de incidents survenus ces derniers jours aux abords des camps de réfugiés syriens en Turquie pour invoquer un droit de « protection » des Etats-membres du Pacte atlantique ; en un mot comme en cent, la Turquie étant en danger, l’OTAN serait en droit, d’après ses statuts, sinon ceux de l’ONU, d’intervenir. On se dit, à la lecture de pareilles informations, que ces gens sont vraiment capables de tout pour arriver à leurs fins. Cette « gangstérisation », ou ce détournement, de la diplomatie par les Américains demeure, hélas, plus de vingt ans après la première guerre du Golfe, une des clefs des relations internationales.
Il fallait certainement jouer la carte du cessez-le-feu et du plan de paix. Tout en se préparant au pire, et en évitant de tirer les premiers. De tenir, tant bien que mal, jusqu’à l’arrivée des observateurs de l’ONU qui ne peuvent être autant d’agents de l’OTAN. Une perspective guère enthousiasmante, mais un passage obligé, pour donner une dernière chance à la pacification de la vie syrienne, condition première de sa réforme. De toute façon, la Syrie n’est pas seule : pas plus aujourd’hui qu’hier, ni Moscou ni Pékin n’accepteront un remake de la Libye. Et sa résistance a sans doute donné le temps à un certain nombre de nations de comprendre de quel côté se trouvait vraiment, pour l’essentiel, la violence et l’oppression.
QUE SE PASSE-T-IL A LA FRONTIERE SYRO-TURQUE?
par Pepe Escobar, Asia Times (Hong-Kong) 11 avril 2012 traduit de l’anglais par Djazaïri
Il y a une vidéo qu’on pourrait intituler assez librement « Terroristes du côte turc de la frontière tirant du côté syrien », ce qui résume assez précisément ce qui se passe dans cet actuel point chaud géopolitique extrêmement volatile.
Lien vidéo : http://www.youtube.com/watch?v=SteUoGZSH0w&feature=youtu.be
La voix qui commente dit, “C’est la frontière syro-turque, et c’est une opération de l’Armée Syrienne Libre [ASL]… La porte [celle qui se situe du côté syrien de la frontière où se trouve le point de contrôle va être prise.»
Ce qui veut dire que la Turquie abrite l’ASL à seulement quelques mètres – et non à des kilomètres – du territoire syrien. Après avoir accueilli un centre de contrôle et de commandement de l’OTAN à Iskenderun il y a plusieurs mois maintenant – un fait déjà signalé par Asia Times Online – la Turquie s’avance désormais juste à la frontière, permettant un aller et retour de guerilleros/mercenaires lourdement armés pour attaquer un Etat souverain.
Imaginez un scénario semblable se produire, par exemple, à la frontière des Etats Unis avec le Mexique, en Arizona ou au Texas.
On peut le voir comme une interprétation très particulière par Ankara des « refuges de protection » et des «corridors humanitaires» tels qu’ils sont mis en avant par le principal modèle proposé pour un changement de régime en Syrie : un rapport du Saban Center de la Brookings Institution rédigé par l’habituel de pro-Israël d’abord et avant tout et «d’experts» du Moyen orient affiliés au Qatar.
Alors attendez-vous à voir un film aux conséquences innombrables; l’ASL attaquant un poste frontalier syrien, tuant des soldats avant de se replier sous une pluie de projectiles qui troucheront inévitablement un camp de réfugiés Syriens tout proche.
L’escalade à la frontière illustre crûment le scenario plus large: la guerre civile.
Le ministre Turc des affaires étrangères Ahmet Davutoglu – avec sa fameuse politique de « zéro problème avec nos voisins » – a dû brusquement interrompre son voyage en Chine pour rentrer en Turquie à cause de l’escalade à la frontière. Ce serait très éclairant de savoir comment la direction politique de pékin lui a fait savoir que les trucs d’agents provocateurs de la Turquie revenaient à jouer avec le feu.
L’escalade à la frontière prouve aussi que l’OTAN n’est pas du tout intéressée par la réussite du cessez-le-feu présenté généralement comme le plan de Kofi Annan (c’est en fait uenversion diluée des plans de la Russie et de la Chine). Les problèmes vont continuer à s’aggraver – comme le suggère un reportage de Russian TV.
Il est évident qu’un gouvernement souverain – la Syrie dans le cas présent – doit exiger des garanties écrites que les opposants armés se conformeront au cessez-le-feu d’Annan.
La raison la plus importante pour laquelle ils ne le feront pas – et ils l’ont souligné publiquement – n’est pas seulement que l’ASL et les guérillas dissidentes continuerons à être armés par le Qatar et la monarchie saoudienne, et renforcés par des « rebelles » Libyens envoyés en Syrie ; c’est que deux membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU, la Grande Bretagne et la France – ont également leurs forces spéciales sur le terrain, engagées dans la formation, le enseignement et des opérations de combat.
La question à mille milliards de livres turques est de savoir si Ankara ira plus loin et mettra vraiment en place les « zones refuges », ce qui reviendra à une implication directe dans la guerre civile syrienne, c’est-à-dire une déclaration de guerre contre Damas. C’est exactement ce que l’ASL implorait les Turcs de faire.
Mais même cela serait insuffisant pour renverser le régime de Bachar al-Assad.
Quant à l’appareil policier et militaire d’Assad, il serait bien inspiré de ne pas se laisser provoquer à aller vers une orgie de tortures, d’exécutions sommaires et de bombardements d’artillerie – car ce sont les conditions nécessaires pour le maintien du soutien diplomatique des principaux membres du BRICS, la Russie et la Chine. Une fois encore, les Syriens ordinaires, pris entre deux feux, seront les tragiques perdants.
NOTE :
Reportage de Russia Today (en anglais) sur les attaques de l’ASL des poste-frontières syriens à l’abord des camps de réfugiés en Turquie : http://rt.com/news/rebels-refugee-camp-attack-665/
Merci !
Les terroristes toujours en action : http://www.sana.sy/fra/338/2012/04/12/412256.htm
un groupe terroriste a visé par un engin explosif un bus militaire transportant des officiers et des sous officiers qui se dirigeaient à leur travail dans l’une des unités militaires à Alep. Un officier est tombé martyr et 24 officiers, sous-officiers et citoyens ont été blessés.
[…]
A Deraa, un groupe terroriste à bord d’une voiture a assassiné le secrétaire du département du parti Baas à Mzeirab, Nasser Bakhit Nasser.
BREVE REVUE DE PRESSE ANGLOPHONE
Dilma Rousseff présidente du Brésil, à l’occasion d’une rencontre avec Obama, s’est opposée à toute sanction contre la Syrie et l’Iran arguant que cela « cause plus de mal que de bien », selon une dépêche de Reuters : http://news.yahoo.com/brazil-concerned-over-iran-oil-prices-sources-230735287.html
Sur les révélations de l’ex-correspondant au Liban, Ali Hashem, récent démissionnaire de la chaîne Al-Jazeera (pour cause de biais dans la couverture de la crise syrienne), et sur le fait qu’à l’encontre du narrative dominant cela montre que la violence de l’opposition a commencé quasiment aussitôt après le début des premières manifestations, on pourra lire en anglais la brillante démonstration de Sharmine Narwani, par ailleurs universitaire dans un « college » anglais et spécialiste du Moyen-Orient : http://english.al-akhbar.com/blogs/sandbox/surprise-video-changes-syria-timeline
L’universitaire As’ad Abu Khalil, alias Angry arab, vient de publier un article étonnant dans al-Akhbar english. Il y est question de la réapparition de Zuhair al-Siddiq. Celui-ci avait été, on s’en souvient, le témoin clé sur lequel avait reposé l’accusation par le TSL du régime syrien quant à la mort de Rafiq Hariri. Cette accusation était finalement tombée à l’eau (avant de se reporter finalement sur le Hezbollah, avec aussi peu de crédit) quand al-Siddiq avait été convaincu de faux témoignage et qu’il avait fui le Liban (pour la France) pour disparaître finalement dans la nature (abrité un temps par les Emirats Arabes Unis puis par Moubarak).
Et bien al-Siddiq est réapparu et pas n’importe où ! Voici la traduction (par bibi) de la fin de l’article d’Abu Khalil qui nous le révèle :
« New TV a diffusé une vidéo dans laquelle Saad Hariri semblait recevoir des ordres de ce faux témoin. Le tribunal Hariri [le TSL] ne se remit jamais de cela dans l’opinion publique libanaise. Siddiq est désormais un homme libre maintenant et se déplace partout, mais pourrait être basé en Turquie.
Siddiq semble émerger maintenant dans l’affaire de l’insurrection syrienne. Il y a eu une vidéo qui a été rendue publique (tirée d’un documentaire tourné par l’opposition syrienne) qui a montré Siddiq rencontrant une figure en vue de l’opposition, Haytham al-Maleh, à Bruxelles. La rencontre paraît bizarre à la caméra et al-Maleh dit à Siddiq que sa «réputation l’a précédé », en référence à sa déposition mensongère. Lors de la réunion, Siddiq a également accusé Israël d’avoir assassiné Hariri (cette partie n’est jamais rendue dans les reportages), puis a quitté la réunion brusquement et menacé al-Maleh. Le frère de Siddiq a plus tard accusé al-Maleh d’avoir empoché environ 30 millions de dollars US provenant de sources canadiennes.
Cela aurait pu faire un bien beau scoop si ce n’avait été sur des personnages et des mouvements que l’Occident ne veulent pas promouvoir et romancer. Mais cela n’a reçu aucune couverture que ce soit. Qui protège Siddiq et qui était derrière son témoignage qui a été remis à Mehlis [procureur du TSL]? Et qu’est-ce que c’était que cette rencontre antre Siddiq et al-Maleh? Al-Maleh a été interrogé sur cette réunion et il a simplement dit qu’il a pris un rendez-vous et s’était rendu au bureau du Conseil National Syrien. Le complot s’épaissit. »
article original d’Abu Khalil : http://english.al-akhbar.com/blogs/angry-corner/zuhair-siddiq-resurfaces
voilà le lien de la vidéo De Haytham Al Maleh et Zouhayr Asseddiq :
http://www.youtube.com/watch?v=QSKPxuAPJ_U&list=UUZ-8I5p6mxrzchZuMpTbLWg&index=4&feature=plcp
Et voilà l’article en français de Sharmine Narwani « Une vidéo « surprenante » change le récit sur la Syrie :
http://www.french.moqawama.org/essaydetails.php?eid=6443&cid=284#.T4NVrkI2rQc.facebook
Merci beaucoup Mohamed.
La vidéo est sidérante.
Content de voir également que certains se chargent de traduire les articles de Sharmine Narwani que je trouve très bons.
On peut parier que Bachar al-Assad a prévu le coup, et que la journée de vendredi lui sera faste au bout du compte. Car il n’y aura pas grand monde aux manifestations de la prétendue opposition, et Bachar n’exposera pas l’armée aux provocations.
exact
aujourd’hui il y a eu moins de 10000 manifestants à travers tout le pays dont beaucoup d’enfants
regardez le site http://www.onsyria.com qui publie toutes les vidéos disponibles de la soi-disant opposition du CNS, il est long à charger mais c’est une référence objective qui n’est pas à négliger … et un vrai « attrape-candide »
on l’a dit et redit : les chiens (bien nourris) aboient la caravane passe.
M. Ghalioun ne représente rien du tout en Syrie et tout le monde le sait y compris ceux qui sont derrière lui. S’il s’avise d’y remettre les pieds il aura à s’expliquer devant les jurys populaires pour haute trahison. Mais il est peu probable qu’il fasse preuve de ce courage … ou de cette inconscience
« Le ministre Turc des affaires étrangères Ahmet Davutoglu – avec sa fameuse politique de « zéro problème avec nos voisins » – a dû brusquement interrompre son voyage en Chine pour rentrer en Turquie à cause de l’escalade à la frontière. Ce serait très éclairant de savoir comment la direction politique de pékin lui a fait savoir que les trucs d’agents provocateurs de la Turquie revenaient à jouer avec le feu. »
Extrait de votre texte tiré de Pepe Escobar.
Oui, j’aimerais savoir ça, un jour.
« Quant à l’appareil policier et militaire d’Assad, il serait bien inspiré de ne pas se laisser provoquer à aller vers une orgie de tortures, d’exécutions sommaires et de bombardements d’artillerie – car ce sont les conditions nécessaires pour le maintien du soutien diplomatique des principaux membres du BRICS, la Russie et la Chine. Une fois encore, les Syriens ordinaires, pris entre deux feux, seront les tragiques perdants. »
Je lis dans ce texte, Kinan.
« orgie de tortures » ça m’a hautement surprise !
Mais bien évidemment, ce sont les Syriens ordinaires qui seront les tragiques perdants.
Hélas.
Le cap de vendredi me paraît important. Je suis sûre que la Syrie vaincra.
Syrie: Ankara fera appel à l’Otan si sa frontière est violée (Erdogan)
Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, en visite en Chine, n’a pas exclu jeudi que son pays puisse faire appel à l’Otan, dont il est membre, en cas de violation de ses frontières par la Syrie voisine, rapportent des médias internationaux.
« Nous avons une multitude d’options. Tout d’abord, nous avons des droits pour le cas de violation de nos frontières et nous pouvons entre autres invoquer l’article 5 de la Charte de l’Otan (cet article signifie que la frontière turque est une frontière de l’Otan, ndlr). Quoi qu’il en soit, nous prendrons une décision en fonction de l’évolution de la situation », a déclaré M.Ergdogan.
Commentant cette déclaration du chef du gouvernement, les médias turcs rappellent que l’article 5 du Traité de l’Atlantique Nord n’avait été appliqué qu’une seule fois, après les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. Néanmoins, l’Otan a plusieurs fois annoncé qu’elle n’envisageait pas d’intervenir en Syrie.
Le premier ministre turc a réaffirmé que son pays ne fermerait pas sa frontière avec la Syrie et qu’il continuerait à accueillir des réfugiés syriens sur son sol. Ankara constate que le nombre de réfugiés syriens en Turquie a déjà dépassé 25.000 personnes, et qu’il s’accroît chaque jour.
http://www.alterinfo.net/notes/Syrie-Ankara-fera-appel-a-l-Otan-si-sa-frontiere-est-violee-Erdogan_b4089636.html
Il faut que les chars et les troupes se retirent du contour des villes, à l’abris des manifestations, ainsi il n’y aura pas de provocation. Et si jamais sa dégénère il ne pourrons pas dire que ce sont les soldats.
il y a un type, comme cela vers les années 1936/38 qui a fait la même chose: il a fait tirer sur les germanisants pour envahir ensuite le pays concerné, histoire de « protéger » son peuple germanique. Je ne donnerai aucun nom. mais le principe est vieux comme le monde.
Sauf qu’il n’y aura pas de Munich avec un Prime british called mr Chamberlain, mais il y a la Brics et tous les pays de la Ligue Arabe qui commencent à réfléchir sur leur devenir dans la région. L’Otan attaquer la Syrie pour protéger….j’ai des doutes vu les risques pour les pays du golf(e) en danger avec leurs opposants intérieurs.
@ Ourika
Vous avez raison d’évoquer cet « incident » de frontière fabriqué par Hitler à la veille de la IIe guerre mondiale.
Cela y ressemble fort, sauf que Hitler avait pratiquement tous les Allemands derrière lui. Ce n’est pas le cas d’Erdogan, comme on peut le lire sur les articles suivants :
http://www.infosyrie.fr/actualite/la-premiere-force-dopposition-turque-condamne-le-soutien-derdogan-aux-groupes-terroristes/
http://www.alterinfo.net/notes/Parti-du-peuple-republicain-turc-rejette-la-politique-d-Erdogan-hostile-a-la-Syrie_b4067936.html
http://www.sana.sy/print.html?sid=412395&newlang=fra
> Voilà ce qui peut donner matière à réflexion au va-t-en guerre Erdogan et à ses commanditaires ; Erdogan n’est qu’un pion pour ceux qui rêvent d’un Grand Moyen Orient dont Israël serait le procurateur :
http://mediabenews.wordpress.com/2012/04/13/liran-ne-restera-pas-spectatrice-face-a-une-intervention-militaire-en-syrie-ou-ce-que-khamenei-chuchota-a-loreille-derdogan/
Cordialement
http://salam-akwaba.over-blog.com/